2017 se termine et il est l’heure de faire un petit bilan. J’ai décidé de le faire sous forme de liste, en reprenant le pire et le meilleur.
Quand on fait une liste, on se doit de faire un choix. Bien évidemment, des choses monstrueuses ont eu hélas lieu pendant ces 365 jours. Quelques événements heureux ont également eu lieu mais il faut renoncer à être exhaustif.
J’ai donc choisi de reprendre les pires tweets de Donald Trump, l’improbable président américain et de vous présenter la liste des livres que j’ai lus et aimés en 2017.
Allez, on commence:
….Transgender individuals to serve in any capacity in the U.S. Military. Our military must be focused on decisive and overwhelming….. — Donald J. Trump (@realDonaldTrump) July 26, 2017
….victory and cannot be burdened with the tremendous medical costs and disruption that transgender in the military would entail. Thank you — Donald J. Trump (@realDonaldTrump) July 26, 2017
1) En plein été, Donald Trump annonce que “les États-Unis n’accepteront plus de soldats transgenres dans leurs troupes“. Reprenons point par point ce tweet car beaucoup d’aspects posent un réel problème.
– Exclure une partie de la population des forces armées en fondant cette décision sur leur préférence sexuelle et leur identité est xénophobe, homophobe et enrageant. Rappelons que les personnes transgenres ne sont autorisées à servir dans les forces armées ouvertement – c’est-à-dire en revendiquant leur identité – que depuis le 30 juin 2016. Le premier soldat transgenre à servir dans les forces armées américaines était Albert Cashier. Né Jennie Irene Hodgers, il a combattu du côté de l’Union pendant la guerre civile. Depuis, de nombreux soldats transgenres se sont illustrés dans les forces armées.
– Trump justifie cette exclusion en estimant que l’enrôlement de soldats transgenres entraînerait des coûts médicaux importants et inutiles et provoquerait des perturbations. Pourtant le 13 mars 2014, un centre de recherches et d’études de San Francisco spécialisé sur les questions de société controversées (la santé aux États-Unis, les questions de sexualité, les discriminations) a publié un rapport démontrant que l’inclusion de soldats transgenres dans les forces militaires n’entraînait pas de coûts médicaux supplémentaires. Je ne vois d’ailleurs pas quels coûts médicaux pourraient être engendrés. Trump rajoute que cela détournerait les forces armées du but principal: la victoire. On retrouve ici un de ses thèmes favoris autour du même champ lexical: être le plus fort, gagner, écraser l’adversaire. Cette thématique est utilisée pour chaque sujet que ce soit face à Kim J0ng-Un quand il menace de frapper la Corée du Nord ou lorsqu’il commente les résultats d’audimat d’Arnold Schwarzenegger.
– Enfin, il ment éhontément lorsqu’il écrit qu’il a pris cette décision après consultation avec des généraux et des experts militaires (à noter l’adjectif possessif utilisé par Trump: les généraux lui appartiennent). Or, à la suite de la publication de ce tweet, le Comité des chefs d’état-major interarmées a affirmé découvrir cette exclusion et le Pentagone a ensuite confirmé qu’il n’appliquerait pas cette décision. Finalement, ce sont les tribunaux qui ont invalidé cette exclusion.
2) Nous continuons avec le feuilleton des joueurs de la NFL (la ligue de football américain) qui refusent de se lever lors de l’hymne national joué avant les matchs. Leur refus est motivé par la violence subie par les Africains-Américains aux États-Unis et par l’impunité policière. Cela avait commencé avec Colin Kaepernick, qui depuis est sans équipe. Toutefois, la dimension politique dans le sport nord-américain n’est pas nouvelle. On se souvient de Tommie Smith et John Carlos lors des Jeux Olympiques de Mexico en 1968.
On retrouve là deux autres thèmes favoris de Donald Trump: le patriotisme primaire et la sanction implacable du puissant sur le faible (fire or suspend). Il avait bien éprouvé ce dernier thème lors de son émission de télé-réalité, The Apprentice, sur la chaîne NBC de 2004 à 2008. Sa phrase préférée alors était : “You are fired!”* https://youtu.be/Z2u8OVK4qD4
Il menace les joueurs de football américain, qui refuseraient de se lever pour l’hymne national, de licenciement. Il prend à témoin les fans et les propriétaires des clubs de football. Ses appels ont eu l’effet inverse à celui escompté. De plus en plus de joueurs ont manifesté ainsi et cette dénonciation s’est propagée à d’autres cercles, des acteurs et des chanteurs notamment ont également mis le genou à terre en signe de protestation. Par ailleurs, les propriétaires des principaux clubs ont soutenu leurs joueurs.
Se mettre ainsi à genoux a également une autre signification en football américain: lorsqu’un quaterback pose le genou à terre alors que son équipe est sur le point de gagner par une petite avance et que le match est bientôt terminé, cela permet d’arrêter le jeu (significatif également d’un point de vue politique donc).
Ces tweets sont à mettre en résonance avec toutes ses prises de positions racistes (Charlottesville notamment).
3) Son soutien à Roy Moore – magistrat et homme politique républicain xénophobe qui concourrait pour le poste de sénateur de l’Alabama
Voyons, voyons ce qui pose problème dans ce tweet:
Tout d’abord, il en appelle au peuple de l’Alabama en lui intimant l’ordre de faire “la bonne chose”.
Mais qu’est-ce donc? Trump ne nous dit pas tout de suite ce que serait la “bonne chose” à faire mais nous décrit en miroir ce qui s’avérerait “mauvais” pour l’Alabama: l’élection de Doug Jones. Doug Jones est Procureur de la République pour l’Alabama depuis 1997. Qu’a-t-il fait de si “mauvais” à ce poste: il a poursuivi notamment deux des auteurs (Thomas Blanton Jr. and Bobby Frank Cherry) de l’attentat de l’église baptiste de la 16ème rue de Birmingham, une attaque du Ku Klux Klan dans laquelle quatre fillettes afro-américaines ont été tuées en 1963. Lors des audiences, il déclarera : “Que ce soit un sujet racial, un sujet relatif au genre, que ce soit à propos d’activités terroristes comme celle perpétrée par M. Blanton en 1963, le message est que nous devons arrêter la haine et que nous punirons ceux qui tuent ou blessent au nom de la haine.”
Pour Trump, l’élection de Doug Jones serait une mauvaise chose pour l’Alabama car le candidat démocrate est pour l’avortement, serait “faible face au crime, à l’immigration clandestine et sur les questions militaires”. Nous venons pourtant de voir que Doug Jones n’était pas en reste lorsqu’il s’agissait de poursuivre les criminels. Il s’agit en creux d’une énième remarque raciste de Trump. Doug Jones serait également une mauvaise nouvelle pour les détenteurs d’armes à feu et les vétérans. Rien dans le parcours de cet homme politique démocrate ne le suggère. Enfin, Doug Jones s’oppose au MUR – comprendre le mur que Trump rêve de construire entre le Mexique et les États-Unis.
Trump conclue par un impératif catégorique: “Votez Moore”. En prêtant de fausses faiblesses à Doug Jones, Trump évite de nommer celles de son candidat, accusé, durant sa campagne, par plusieurs femmes, dont deux adolescentes, d’avoir abusé d’elles dans les années 1970. Trump déclarera plus tard, alors interrogé par des journalistes, que Roy Moore nie ses accusations et que par conséquent c’est une personne digne de confiance. De la bouche d’un homme accusé à multiples reprises d’agressions sexuelles et se vantant de s’être adonné à ces pratiques, je doute que l’argument passe. Il n’est d’ailleurs pas passé auprès des électeurs de l’Alabama qui ont voté le 12 décembre 2017 pour Doug Jones.
4) Sa déclaration subite sur Jérusalem
Le New-York Times révélera plus tard que l’Égypte et l’Arabie Saoudite étaient parfaitement au courant et soutiennent cette décision. Il s’agit, je crois, de l’une des pires décisions de politique étrangère prise par un Président américain avec la guerre du Vietnam, la guerre du Golfe et le soutien aux Contras (la liste n’est pas exhaustive).
Il s’agit d’une déclaration assez symbolique étant donné que faute de bâtiment disponible à Jérusalem, l’ambassade américaine demeure à Tel-Aviv et que le transfert global de la diplomatie américaine à Jérusalem prendrait environ quatre ans. Toutefois, agissant de la sorte, Trump torpille d’éventuels et fragiles espoirs d’entente future entre les deux parties en présence. Trump a également menacé de couper les vivres aux pays qui s’opposeraient à cette décision. Cela n’a pas empêché 128 pays, membres de l’Assemblée générale de l’ONU, de voter une résolution condamnant cette décision unilatérale américaine. Trump, tout comme l’ambassadrice américaine à l’ONU Nikki Haley, ont utilisé à multiples reprises le champ lexical de la menace et de la répression pour répondre à ce vote.
https://www.franceinter.fr/emissions/le-moment-meurice/le-moment-meurice-20-decembre-2017
5) Rocket Man ou la défaite de la politique étrangère
On continue avec la désastreuse gestion de la politique étrangère des États-Unis par Donald Trump avec ce tweet.
Rocket Man est King Jong Un, le leader nord-coréen qui tente de se doter de l’arme nucléaire et effraie périodiquement ses voisins en faisant des essais de bombe H dans les sous-sols de son territoire et en tirant au-dessus des pays limitrophes des missiles balistiques intercontinentaux. L’ONU condamne, la Russie et la Chine poussent pour un dialogue et Trump crie, gesticule, tape du pied et ridiculise son adversaire comme un gamin en culotte courte dans une cour de récréation. L’insulte comme ultime instrument de politique étrangère (Trump a également utilisé cette méthode en politique intérieure en insultant les dirigeants de Puerto Rico, territoire nord-américain durement frappé par un cyclone).
Attention spoiler, Trump récidive en 2018 en encourageant une guerre nucléaire à coups de tweet comme un gamin qui dirait, en reprenant sans le savoir Souchon, “Tar’ ta gueule à la récré” sauf que là, il s’agit de bombes nucléaires et les États-Unis sont bien placés pour savoir le désastre et la désolation qu’elles entraînent car ils sont le seul pays à les avoir utilisées lors d’un conflit armé.
Heureusement, j’ai pu libérer et soulager mon esprit en dévorant quelques livres en cette année 2017. Mon long trajet quotidien en train jusqu’à Bridgewater, au fin fond du New Jersey, me permettait de me plonger dans des univers autrement plus intéressants que celui que j’allais retrouver.Je partage avec vous la liste non exhaustive des livres qui m’ont plu.
– The Underground Railroad – Colson Whitehead – Doubleday. Un ouvrage indispensable sur l'”Underground Railroad”, formidable stratagème mis en place par des esclaves africains-américains et quelques alliés blancs pour permettre aux esclaves du Sud de gagner le Nord puis le Canada et être enfin libres. C’est parfaitement écrit, comme un roman, rigoureusement documenté et indispensable pour commencer à comprendre les questions raciales aux États-Unis.
– Gun Machine – Warren Ellis – Le Livre de Poche. L’histoire se déroule dans un Manhattan transformé en île au trésor angoissante où la ville devient un personnage à part entière et joue un rôle déterminant dans l’issue du récit. C’est haletant et passionnant.
– Histoire Criminelle des États-Unis – Franck Browning&John Gerassi – Nouveau monde poche. Passionnant, le livre retrace précisément les grands et petits événements criminels qui ont forgé l’Histoire et la culture nord-américaine (des sorcières de Salem au Watergate).
– Lettres à Lou Andréas-Salomé – Rainer Maria Rilke – Mille.et.une.nuits. C’est un recueil des lettres que Rilke a envoyé à Lou Andréas-Salomé de 1897 à 1926 et au fil desquelles on découvre leur amour, leur amitié, leur complicité intellectuelle et surtout l’influence majeure que Lou Andréas-Salomé a eu sur l’art de Rilke, comme elle l’a eue sur la philosophie de Nietzsche ou la démarche intellectuelle de Freud. On y découvre en pointillé le portrait d’une très belle femme forte, opiniâtre, volontaire, intelligente et courageuse.
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